La Loire en kayak

 

Pendant neuf jours et sur un peu plus de 300 kilomètres, Justine Andres et moi avons descendu la Loire de Nevers à Tours. Un projet sportif mais aussi engagé puisque nous avons recensé les déchets sur le fleuve dans le cadre du projet Plastic Origins. 

 

Prologue

 

Cette année les conséquences du dérèglement climatique sont à nos portes. La fonte des calottes glaciaires de l’hémisphère Nord entraîne des vagues de froid inattendues qui descendent à nos portes, entraînant par exemple les gelés tardives du printemps dernier qui ont détruit des récoltes entières. De l’autre côté de l’océan, le Canada a connu un épisode caniculaire sans précédent avec des températures avoisinant les 50°C. Et cet été, pendant que les États-Unis et la Grèce étaient en proie à des feux incontrôlés, l’Allemagne, la Belgique, la France et la Chine ont connu des pluies d’été diluviennes entraînant le débordement de certains cours d’eau, des glissement de terrain et de nombreux morts.

Pour agir à notre mesure, Justine Andres et moi avons proposé à Surfrider Fondation de prendre part à leur projet de sciences participatives nommé Plastic Origins qui vise à observer la pollution des cours européens pour alimenter une cartographie de la pollution marine européenne. Notre regard s’est porté sur la Dordogne que nous souhaitions descendre en kayak, armés de deux pagaies, de notre bonne volonté et de l’application Plastic Origins pour recenser tous les déchets croisant notre chemin. Pour nous aider dans cette entreprise, Itwit a accepté de nous équiper afin de faciliter notre projet tout aussi sportif qu’engagé.

Lorsque Justine et moi sommes arrivés sur les bords de la Dordogne, nous n’étions pas au bout de nos surprises. Nous souhaitions observer la pollution du cours d’eau pour rapporter des images de l’impact humain sur les milieux marins. À notre arrivée, nous avons trouvé un fleuve en cru, sous le joug d’un arrêté préfectoral interdisant la baignade et la navigation en canoë-kayak à cause du niveau d’eau et du débit jugé dangereux. Les locaux décrivaient le fleuve comme n’ayant jamais eu un niveau d’eau aussi élevé en été. Plus au Nord, la Seine et la Loire avaient aussi enflé et avaient des niveaux d’eau supérieurs aux normales saisonnières. Cela à cause de pluie d’été diluviennes directement imputable au dérèglement climatique. Les conséquences de ce dernier, et donc de l’activité humaine, se dévoilaient sous les yeux du monde entier.

Malgré ça, nous avons quitté les bords de la Dordogne au profit de la Loire. Plusieurs clubs de kayak que nous avions appelé nous avaient décrit le niveau d’eau du fleuve comme anormalement élevé mais toujours praticable. De la Dordogne à la Loire, nous avions fait du chemin, eu quelques jours pour questionner notre projet et avions désormais un nouveau patient à examiner, mais l’objectif restait le même : observer la pollution du cours d’eau pour alimenter la carte de la pollution des cours d’eau européens créée et gérée par Surfrider Fondation, mais aussi, car c’est important, vivre une belle aventure !

 

 

De Nevers à Tours

 

À Nevers, nous avons immédiatement pris conscience du danger principal de notre aventure : le passage des ponts. Derrière le pont de Nevers, il y a une jeté métallique qui se repère difficilement lorsque l’on vient de l’autre côté du fleuve. Nous avons décidé de démarrer derrière ce pont.

Les premières heures étaient particulièrement agréables car la Loire traverse des zones sauvages et silencieuses. On s’est immédiatement senti dépaysé ! Contrairement à la marche, le vélo, le roller ou tout autre moyen de déplacement terrestre qui demande plusieurs jours avant de réussir à se déconnecter du quotidien, sur l’eau on se sent coupé du monde en quelques minutes. Quitter notre élément naturel, la terre, pour avancer sur l’eau créé une scission immédiate avec la routine.

Peut-être à cause du niveau d’eau plus élevée que la normale saisonnière, nous n’avons vu aucune embarcations le premier jour. Le fleuve était tranquille. Après 30 kilomètres, le plus plaisant fut l’installation du camp sur un îlot ! Avec ses nombreux îlots et banc de sable, la Loire permet de naviguer plusieurs jours dans le silence et de dormir chaque soir sur des plages différentes. Pour ceux qui rêvent de se couper du monde sur une île déserte, le plus grand fleuve de France est peut-être la solution.

 

 

Le lendemain, nous avons aperçu nos premiers déchets. Avec Plastic Origins nous avons fait une formation en ligne afin de découvrir leur projet et de prendre leur application, mais c’était notre première utilisation sur le terrain. Plutôt simple, il suffit de choisir la rive (droite ou gauche), le mode de déplacement (kayak ou marche le long de la berge) et le mode de saisi (manuel ou vidéo, auquel cas l’intelligence artificielle identifie le déchet sur le clip vidéo). Ensuite, on indique le type et le nombre de déchets observés et on envoie les données ! L’objectif du projet Plastic Origins est de recenser la pollution des cours d’eau pour alerter des pouvoirs public sur la provenance de la pollution maritime et ainsi agir à la source. Leur projet s’arrête cependant au recensement et nous nous appliquions à ramasser tous les déchets observés. Sur le kayak un espace était prévu pour les sacs poubelles.

On a continué notre chemin vers Orléans avec ce rythme journalier propre à une aventure en kayak : on pagaie, on décharge nos affaires sur un îlot, on dort, on repart !

 

 

La nuit, nous étions bercés par le chant des grenouilles et le déplacement des oiseaux et des castors autour de la tente. S’il n’y avait pas eu les moustiques, nous aurions touché la perfection !

 

 

En chemin, quelques rencontres et découvertes on animées nos journées. On s’est retrouvé maîtres d’une cabane magique pendant quelques heures, co-équipiers d’une embarcation en bois traditionnel, explorateurs d’un bras de fleuve à la végétation luxuriante après s’être trompé de chemin.

 

 

Près du barrage qui fait face à la centrale nucléaire de Belleville-sur-Loire, Justine et moi avons tourné dans le mauvais bras et nous sommes embarqué au cœur d’une végétation que nous avons traversé non sans mal. Certains passages contenaient si peu d’eau que nous avons dû marcher et remettre le kayak à flot quelques mètres plus loin. Nous devons notre réussite seulement au niveau d’eau plus élevé que la normale saisonnière et sans cela nous aurions eu du mal à sortir de cet endroit. Une fois sorti de là, on a aperçu le bras que nous aurions dû emprunter en nous disant : « C’était tellement drôle ! On a bien fait de se tromper. »

Arrivés à Orléans, nous avons rendu visite à une amie quelques jours avant de retourner à l’eau. Après Orléans, la Loire est de plus en plus habitée et les tronçons sauvages se font de plus en plus rare. Le soir, depuis les îlots, il n’est pas rare d’entendre le bruit des gens sur les berges. Sentiment étrange que de dormir coupé de tout, au milieu de l’eau, et en même temps si près des autres. Mais les soirées au bord de l’eau n’ont pas perdu leur charme pour autant.

 

 

Après neuf jours sur l’eau et un peu plus de 300 kilomètres nous arrivions à Tours. Retrouver sa bipédie n’est pas déplaisant car les journées sur le kayak sont merveilleuses et pleines de poésie, mais énergivores. Nous restons convaincus que le kayak est un mode de déplacement qui a le pouvoir de nous sortir de notre routine en un temps record. Alors n’attendez pas, jetez-vous à l’eau !

 

Le matériel

 

L’équipement nous a été fourni par Itiwit. Lorsque l’entreprise nous a demandé quel kayak serait le plus adapté à notre projet, nous avons répondu sans hésiter : le kayak Touring 100 deux places. Ce kayak gonflable s’est montré très résistant bien que nous ayons franchi des bras d’eau peu profond. Chaque fois que le fond du kayak cognait contre un banc de sable je craignais une crevaison mais l’embarcation ne nous a pas fait défaut. Pour avancer, les pagaies Itiwit x100 sont en aluminium et pèsent 1100g. Les tenir toutes la journée demande plus d’effort que des pagaies en carbone mais elles sont très solides et offrent une résistance ferme dans l’eau. Nous transportions notre équipement de bivouac, nos vêtements ainsi que nos provisions et de l’eau dans un sac à dos étanche Itiwit 30L ainsi que des sacs polochon 10L et 40L. Ils étaient parfaits et satisfaisaient parfaitement nos besoins.

 

 

 

Rapport de la pollution du fleuve

 

Nous avons été étonnement surpris de découvrir un fleuve peu pollué en déchet plastique. Sans grande surprise, les berges des grandes villes sont très polluées mais sur le reste du fleuve, à l’exception d’une ou deux bouteilles observées tous les deux à trois jours, le fleuve ne contenait aucun déchet. Nous soupçonnons le débit élevé du fleuve, dû au niveau d’eau plus élevé que la normale saisonnière, d’avoir transporté les déchets plus en aval vers la mer.

18/07 (J1 : Nevers – En amont de La Marche / 30km)
Aucun déchet aperçu aujourd’hui.

19/07 (J2 : En amont de La Marche – Près de Bannay / 39 km)
Deux déchets aperçu dont une bouteille plastique. Les deux ont été recensé près de La-Charité-sur-Loire et ils ont été indiqués dans l’application Plastic Origins.

20/07 (J3 : Près de Bannay – Châtillon-sur-Loire / 35 km)
Aucun déchet aujourd’hui

21/07 (J4 : Châtillon-sur-Loire – Dampiere-en-Burly / 33 km)
Une bouteille d’alcool en verre trouvée aux abords de Gien ainsi qu’une canette sur l’îlot où nous avons dormi.

22/07 (J5 : Dampiere-en-Burly – En aval de Saint-Benois-sur-Loire / 24 km)
Aucun déchet aperçu aujourd’hui.

23/07 (J6 : En aval Saint-Benois-sur-Loire – Orléans / 40 km)
De nombreux déchets sur les berges d’Orléans.

28/07 (J7 : Orléans – Muides-sur-Loire / 43 km)
De nombreux déchets observés après Orléans.

29/07 (J8 : Muides-sur-Loire – Amboise / 55 km)
Peu de déchets aujourd’hui.

30/07 (J9 : Amboise – Tours / 26 km)
Une plage pleine de déchets aux abords de Tours. Des berges polluées à Tours.

 

 


Lire le récit publié par Itiwit